
Le 7 février dernier, André Noël signait, dans la revue en ligne Pivot, une chronique intitulée Francine Pelletier, Le Devoir et la vérité, dans laquelle il se permet de faire la leçon à Madame Pelletier en lui disant que la vérité existe et qu’elle a tort de lui préférer le débat. Il y allait alors d’une énumération de vérités : La terre est ronde, le tabac tue, Trump a perdu ses élections, des centaines de scientifiques cherchent des traitements contre la COVID, la fluvoxamine n’est toujours pas considérée comme un « outil intéressant » contre la COVID, les vaccins sont utiles même pour les 50 ans et moins et le Dr Raoult est un imposteur.
Cette liste constitue un vieux truc de rhétorique nommé amalgame : en incluant des supposées vérités dans une liste de vérités établies, on leur donne, par association, un statut qu’elles n’ont pas nécessairement. Ce procédé est plutôt facile et la liste mérite qu’on l’examine de plus près pour y dénicher les erreurs.
Première erreur majeure : au contraire de ce que laisse entendre la liste, toutes ces « vérités » ne sont pas du même ordre.
- Que Trump ait gagné les élections ne relève pas de la science, sinon très indirectement. Un appareil administratif complexe et contrôlé permet de l’affirmer sans qu’il y ait de doute raisonnable.
- Que des centaines de scientifiques cherchent des traitements contre la Covid relève d’un double processus de recensement des publications à cet effet, et d’une déduction (si le gouvernement a distribué autant de fonds, c’est qu’il y avait des projets soumis). Je pense par ailleurs que la proposition de Madame Pelletier dans son article du 2 juin, c’est que les grands labos pharmaceutiques, ceux qui ont les moyens financiers, s’étaient possiblement traîné les pieds dans cette recherche, pour le plus grand profit de leurs vaccins.
- Deux de ses affirmations sont des faits scientifiques établis : la terre est ronde et le tabac tue (on peut y ajouter celle sur le réchauffement climatique affirmée dans le paragraphe précédent). Elles partagent un certain nombre de caractéristiques :
- un temps long : elles ont été établies sur une longue, voire une très longue période de temps
- par un nombre élevé de « chercheurs » indépendants
- qui partageaient leurs données à cet effet
- qui sont des données d’observation.
- Elles ont toutes été combattues par les pouvoirs privés de l’époque : les manufacturiers de cigarettes, les sociétés pétrolières et l’Église catholique, peut-être la plus grosse société privée à l’époque de Copernic et Gallilée.
- L’affirmation à l’effet que Didier Raoult est un imposteur est un jugement sur la base de normes et de valeurs qui sont relatives. Si on le juge professionnellement et scientifiquement sur sa découverte, en tant que microbiologiste, des virus géants, certains sont d’avis qu’il mériterait le Prix Nobel de physiologie/médecine. Si on se fie à ses positions quant à l’hydroxychloriquine ou aux vaccins, il est nettement en dehors de sa compétence (et peut-être en ce sens un imposteur).
- Ce qui nous amène aux deux affirmations qui restent dans cette liste : que la fluvoxamine n’est toujours pas considérée comme un « outil intéressant » contre la COVID et que les vaccins sont utiles même pour les 50 ans et moins. La première des deux est fausse et la seconde n’est pas scientifique. La fluvoxamine est considérée comme un outil intéressant pour la Covid sinon on ne serait pas en train de procéder à des essais cliniques pour savoir si elle est efficace ou non. Et la seconde affirmation n’est pas scientifique parce que l’utilité n’est pas un concept scientifique. Ce qui l’est c’est l’efficacité. Et la démonstration de l’efficacité d’un produit ou d’une procédure, c’est une tout autre sorte de science que celle des découvertes (les virus géants du Dr Raoult) et que celle de l’observation et de la mesure (la terre ronde, le tabac qui tue et le réchauffement climatique). Il s’agit de médecine scientifique, qui opère en posant des questions spécifiques, et qui possède ses propres critères de validité :
- la seule manière reconnue, à la fois scientifiquement et sur le plan réglementaire, d’évaluer l’efficacité et l’innocuité d’un médicament, d’une intervention diagnostique ou thérapeutique, préventive ou curative ou d’un produit de santé, est l’essai clinique randomisé (e.c.r.), à double insu ou double aveugle
- des règles spécifiques sur la manière de conduire ces e.c.r. ont été formulées pour en assurer la validité et faute d’adhérer à ces règles, une e.c.r. ne peut être considéré comme valide ((les références suivantes au besoin https://doi.org/10.1136/bmj.l4898, https://emj.bmj.com/content/20/2/164, https://www.fda.gov/media/71336/download, entre autres)
- les e.c.r. qui ont testé les quatre vaccins actuellement approuvés au Québec n’ont pas respecté ces règles :
- des doutes sérieux quant à l’indépendance des chercheurs et du comité d’évaluation (rémunérés par ou redevables aux sociétés pharmaceutiques)
- hypothèse primaire qui semble avoir changé en cours de route
- pas de double insu (probablement un des plus grands manquements)
- désaveuglement en cours d’expérience sans motif valable avec offre de vaccination des participants du groupe témoin (donc disparition du groupe témoin)
- pas d’accès aux données brutes pour des chercheurs indépendants (https://www.bmj.com/content/376/bmj.o102, https://aaronsiri.substack.com/p/fda-asks-the-court-to-delay-first)
- résultats présentés en Réduction du Risque Relatif (95%) plutôt qu’en Réduction du Risque Absolu (0.88%) https://weoo.be/covid/COVID19-vaccination.pdf) et
- manque de recul en ce qui concerne les risques à moyen et long terme de cette technologie tout à fait nouvelle.
- il s’ensuit donc que ces e.c.r. ne peuvent par conséquent pas être considérés comme valides, et qu’on ne peut donc pas conclure à l’efficacité des vaccins (on ne peut non plus conclure à leur inefficacité), pas plus qu’à leur innocuité.
- En l’absence d’efficacité et d’innocuité démontrées, le principe de prudence (primum non nocere) s’applique, étant donné qu’il n’y a pas de possibilité d’établir pour chaque catégorie de patients le rapport risques/bénéfices.
- Bien sûr, on objectera qu’on a fait toutes sortes d’études et de mesures à la suite du déroulement des opérations de vaccination et que ça se serait avéré efficace. C’est comme de dire que l’apprenti-chirurgien n’a pas réussi ses examens mais qu’on a néanmoins décidé de le laisser pratiquer sur une population entière, une opération censée prévenir un problème possible chez certains d’entre eux; on mesurerait ensuite…
La sorte de science particulière que constitue la médecine scientifique établit clairement le mécanisme incontournable pour établir « la vérité », toute provisoire que soit celle-ci. Prétendre que ces vaccins sont efficaces n’est pas scientifique et dire qu’ils sont utiles non plus.
Celui qui vit dans une maison de verre ne doit jeter de pierres à personne.